Interview du Sergent Jean-Luc Mouior, sapeur-pompier volontaire à Fleurance

 

 

 

 

> Présentez-vous

Je suis le Sergent Jean-Luc Mouior, j’ai 52 ans et je suis sapeur-pompier volontaire au centre d’incendie et de secours de Fleurance depuis 20 ans. J’exerce le métier d’ambulancier privé depuis 25 ans.

 

> Je crois que vous avez été appelé sur une suspicion de cas de Covid 19, pouvez-vous nous expliquer le protocole suivi et ce que ça change par rapport à un secours à personne classique ?

Effectivement, le centre d’incendie et de secours de Fleurance a été déclenché mercredi dernier (25 mars) aux alentours de 18h30 pour une ouverture de porte classique sur la commune de Fleurance. Deux engins ont été dépêchés sur place : un VSAV (véhicule de secours et d’assistance aux victimes) et un VTU (véhicule toutes utilités). Je faisais partie de l’équipage du VSAV.

Lors du traitement de l’alerte, cette intervention était considérée comme normale (ouverture de porte classique). Nous nous sommes donc équipés avec la protection prévue par le protocole d’intervention hors suspicion de COVID-19 : des gants et un masque. Une fois arrivés sur les lieux, nous avons immédiatement posé un masque à la victime afin de nous protéger et de la protéger. Nous avons respecté les distances de sécurité pour lui poser les questions nécessaires à l’établissement du bilan.

Une fois les informations recueillies et le bilan passé, l’intervention a basculé en suspicion de COVID-19. Avec le deuxième équipier du VSAV, nous nous sommes donc retirés pour revêtir la protection complète : combinaison et lunettes de protection en plus des gants et du masque. Pendant ce laps de temps, le conducteur du VSAV est resté auprès de la victime. Pour la suite de l’intervention, ce dernier a été remplacé par l’un des sapeurs-pompiers du VTU qui n’a pas été en contact avec la victime, afin d’éviter la contamination de la partie conducteur du VSAV.

Nous avons ensuite évacuée la victime au centre hospitalier d’Auch. Contrairement à ce qui se pratique habituellement, en cette période de crise sanitaire les véhicules de secours attendent sur le parking des urgences qu’un personnel de l’hôpital prenne en charge la victime. Il y avait ce jour là une affluence d’ambulanciers et de sapeurs-pompiers avec, pour certains d’entre eux, des cas avérés. Nous avons dû nous montrer patients.

La désinfection du brancard s’est faite sur place. Nous sommes ensuite repartis en tenue complète au centre d’incendie et de secours de Fleurance. Le conducteur quant à lui est toujours resté dans sa cabine avec l’équipement léger.

Une fois revenus au centre, nous avons procédé à la désinfection complète de la cellule du VSAV, ce qui nous a pris environ 20 minutes, et nous avons suivi le protocole de déshabillage.

 

> Pouvez-vous nous dire quel sont les gestes barrières que les sapeurs-pompiers doivent effectuer pour eux-mêmes et pour le matériel, avant et après une intervention ?

Au-delà des gestes barrières qui doivent systématiquement être respectés à la maison, au centre d’incendie et de secours ou auprès des victimes, le SDIS 32 a mis en place un protocole opérationnel spécifique pour les interventions classiques (hors suspicion de COVID-19) et un protocole renforcé pour les interventions avec suspicion de COVID-19.

À l’arrivée au centre de secours, lavage des mains, habillement avec l’équipement adapté (gants et masque pour une intervention classique) auquel s’ajoute pour une suspicion de COVID-19 la combinaison et les lunettes. Sur intervention, la victime est immédiatement équipée d’un masque. De retour au centre d’incendie et de secours, la cellule du VSAV est complètement désinfectée et l’équipage se déshabille conformément au protocole.

Le protocole est expliqué en image dans la vidéo Directive opérationnelle COVID-19 / SDIS 32

 

> On sait que le confinement a changé le quotidien du SDIS, avec peut-être moins d’interventions traditionnelles mais la nécessité de se préparer à des situations inédites. Quel est votre état d’esprit et celui de vos camarades ?

Effectivement, nous réalisons beaucoup moins d’interventions qu’habituellement, quasiment plus d’accidents ni de chutes.

Habituellement, j’aime la sensation que procure l’adrénaline à l’idée d’une intervention importante mais depuis la crise sanitaire, je ressens une certaine appréhension à chaque fois que le bip sonne. Il s’agit d’une menace invisible que l’on peut difficilement maîtriser. La fatigue physique ressentie lors d’une intervention complexe, lorsque l’on doit porter du poids, désincarcérer un véhicule ou éteindre un incendie, est bien plus facile à gérer que la fatigue psychologique et morale que je ressens en ce moment. On doit en permanence être sur le qui-vive : penser à tous nos gestes, bien s’équiper, ne pas se gratter le visage…

Pour en avoir discuté avec d’autres sapeurs-pompiers, nous sommes nombreux à être dans cet état d’esprit. Récemment, nous avons été mobilisés trois heures sur une intervention avec suspicion de COVID-19, à devoir porter la combinaison qui tient chaud. Nous ne sommes pas habitués à de telles situations mais nous sommes engagés et nous continuerons à secourir la population.

 

> Même quand on est bien formé, il faut toujours avoir un peu peur pour donner le meilleur de soi-même ?

Les sapeurs-pompiers ne sont pas plus forts que les autres, ce ne sont pas des sur-hommes ! Je pense que la peur est nécessaire pour éviter les erreurs. Elle permet d’être vigilant et attentif à la situation.

 

> Des conseils à donner pour limiter tous risques d’accidents ménagers dus au confinement ?

Toute la semaine, le SDIS 32 a mis en ligne sur sa page Facebook des vidéos de prévention des risques domestiques.

 

RSS
Follow by Email
Facebook
Twitter
LinkedIn
Instagram

Laisser un commentaire